observatoire des sondages

La France championne de la consommation de psychotropes et de sondages

mardi 24 novembre 2009

Qu’il s’agisse de la qualification peu glorieuse de l’équipe de France de football (OpinionWay-France 2, 22 novembre 2009), des croyances sur les chances de Ségolène Royal d’être désignée candidate du parti socialiste à la prochaine élection présidentielle (LH2 Nouvelobs.com 23 novembre 2009), en passant par l’interdiction de la fessée (TNS Sofres- Dimanche Ouest France 22 novembre 2009), ou les dépenses prévues pour Noël en cette période de crise (Ipsos-France Bleu, 23 novembre 2009) rien ou presque n’échappe à la compulsion sondagière qui soumet des sondés conciliants à des questions sur tout et n’importe quoi, et conduit la presse à en faire état complaisamment.

A l’instar de la consommation massive de psychotropes par les Français, que certaines recherches menées pour le ministère de la santé (Mission générale concernant la prescription et l’utilisation des médicaments psychotropes en France, Zarifian, 1996) ont attribué principalement aux prescriptions systématiques de drogues par les médecins généralistes à des patients qui n’en avaient pas besoin, relevant plus d’un « détournement de la médecine » et d’une « médicalisation systématique du moindre vague à l’âme » que d’un geste prophylactique, pour le plus grand bonheur des laboratoires pharmaceutiques, cette sondomanie ne ressemble guère à la fable aux accents démocratiques que nous content les sondeurs et nombre de journalistes.

Sur le désir des « vrais gens » de s’exprimer et de se faire entendre par les sondeurs, rappelons que le phénomène de baisse tendancielle du taux de réponse chez les personnes interrogées a conduit les instituts de sondages à généraliser leurs tactiques pour stimuler ce « désir » faiblissant, en payant leurs participations et leurs réponses, y compris, on le sait maintenant, pour les sondages portant sur des intentions de vote (cf. Faire parler le peuple). La multiplication des sondages en ligne, plus rapides et moins chers, complétant ce dispositif propice à l’accentuation du phénomène de profusion sondagière. Que le paiement des sondages faits par ces instituts, sans même parler des défauts méthodologiques qui les affectent, comme l’atteste encore une fois cette dernière vague d’enquêtes stupides et sans intérêt, si ce n’est pour leurs fabricants, leurs commanditaires, et des commentateurs en manque d’inspiration, n’ait pour l’instant pas suscité la moindre interrogation sur leur fiabilité confirme donc si besoin était, une tendance lourde à la « sondo-dépendance ».

Les responsables politiques et les journalistes sondo-dépendants sont-ils victimes à leur tour du syndrome dont semblaient souffrir, selon le rapport sur la consommation de psychotropes des Français, une partie des médecins généralistes et pour lesquels « il est plus rapide de prescrire un tranquillisant que de prendre le temps d’écouter son patient » ? A l’instar des crises de surproduction qui émaillent régulièrement les économies capitalistes modernes, la profusion des sondages finira par déboucher sur une crise de surproduction, sauf à penser que nous y sommes déjà et que l’une des ses premières victimes est la démocratie.

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