observatoire des sondages

Sonder sans sondage

jeudi 28 mai 2009

Familiers des médias, quelques sondeurs nous livrent régulièrement leurs analyses politiques. Leur propos a-t-il de l’intérêt ? Et nous parlent-ils seulement de sondages ? Quelques extraits d’une interview récente sur France Info (mai 2009) nous démontrent que non.

Louise Bobet - France Info : La crise joue un rôle finalement dans cette baisse de popularité, dans cette déception que ressentent les Français à l’égard de Nicolas Sarkozy ?

Jérôme Fourquet [1] : La crise qui est une crise sans précédent par rapport à celles qu’on a connues ces 10 ou 15 ou 20, 30 dernières années effectivement joue un rôle dans le fait que la popularité de l’exécutif ne soit pas au beau fixe, pour autant face à une crise aussi importante on aurait pu s’attendre à une popularité moins importante pour Nicolas Sarkozy, ce n’est pas le cas...

Louise Bobet - France Info : Le PS a bien du mal à incarner une alternative crédible c’est l ‘une des raisons pour lesquelles finalement Nicolas Sarkozy pourrait ne pas être aussi bas que certains l’espèrent ou l’avaient prévu, est-ce que Nicolas quelque part a réussi à "impuissanter" le PS ?

Jérôme Fourquet : Nicolas Sarkozy bénéficie, ou souffre d’un niveau de popularité qui est certes loin des 50% mais encore une fois placé, replacé à l’aune de l’intensité de la crise économique c’est un niveau somme toute relativement acceptable ce qui fait qu’aujourd’hui dans les intentions de vote qu’elles soient théoriques c’est à dire si l’on projetait les élections présidentielles 2 ans après ou plus concrètes, plus immédiates sur l’issue éventuelle du scrutin des européennes on s’aperçoit que l’UMP et Nicolas Sarkozy bénéficient encore d’un niveau d’un noyau dur relativement stable et solide…On n’a pas fait récemment d’enquêtes qui mettaient en situation des électeurs sur une configuration de second tour, mais quand on voit ce que l’on a sur les résultats de premier tour ce n’est pas absurde ou impossible de penser que Nicolas Sarkozy pourrait être réélu.

La faute à la crise. C’est le nouveau lieu commun. Impossible à prouver. Car en serait-il autrement s’il n’y avait pas de crise ? On peut même imaginer l’inverse en assurant que sans crise Nicolas Sarkozy n’aurait pas d’alibi et serait plus déconsidéré encore. Bien sûr, aucun sondage ne peut le prouver, ni dans un sens ni dans l’autre. Mais s’agit-il de sonder ?
On observe là un exemple remarquable de sondeur invoquant l’absence de sondage. Qui est « on » ? Que sont des « intentions de vote théoriques » ? Et qu’est-ce qui permet de dire que « Nicolas Sarkozy pourrait être réélu », pas moins de trois ans avant, dans le cas où « on n’a pas fait d’enquêtes » ? Dans la concurrence sur les coûts que se font les instituts de sondages, Jérôme Fourquet propose une solution imbattable : le sondeur sans sondage.
Faudrait-il d’ailleurs être sot pour croire qu’il s’agit encore de sondage. La faute à la crise n’est jamais que le mot d’ordre élyséen pour gouverner. Que des journalistes et des sondeurs le reprennent sans examen et en boucle ne fait qu’établir le constat d’une situation : les sondeurs à la solde de Nicolas Sarkozy. Ils reçoivent beaucoup d’argent des commandes publiques. Ils ne peuvent mécontenter leurs commanditaires. Sondeurs soldés. Au moins, on sait à quoi s’en tenir.

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N. Sarkozy se voit décerné, par l’Ifop, 3 ans avant les présidentielles de 2012, le titre de favori de l’élection.

[1Directeur-adjoint du pôle Opinion et Stratégies d’Entreprise de l’Ifop

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