Mercredi 2 mai au soir, a lieu le débat télévisé entre les deux candidats du deuxième tour de l’élection présidentielle, par ordre alphabétique François Hollande et Nicolas Sarkozy. On sait que ces débats ne changent rien puisque les avis sont faits et que chaque électeur entend ce qu’il a envie d’entendre. Ils servent donc au spectacle comme la directrice de l’information télévisée s’en réjouissait au journal de 13 heures le lendemain du premier débat organisé en 1974 à la télévision française entre Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand : « Plus jamais les campagnes électorales légales ne seront comme avant. Dorénavant, nous n’aurons plus de campagnes légales – qui sont l’obligation du service public – aussi compassées. Et je ne vois pas pourquoi de véritables confrontations d’idées n’auraient pas lieu sur les antennes de télévision » [1]. Le débat fait au moins l’affaire des médias. Les duellistes et leurs équipes ne pourront cependant éviter de croire qu’il se joue quelque chose. Sinon autant renoncer à la politique. Il le faut bien pour paraître motivé et convaincant. Cette illusion politique conduira d’ailleurs comme en 1974 (par téléphone sur un échantillon très étroit) ou en 2007 (par internet) à tenter d’imposer un verdict : qui a gagné ? Cette application élémentaire du théorème de Thomas – « Quand une situation est considérée comme réelle, elle est réelle dans ses conséquences » [2]- sera tentée par un ou plusieurs sondeurs, plus ou moins au profit d’un candidat, comme OpinionWay l’a fait en 2007. Les citoyens sauront donc le lendemain quel sondeur s’est aventuré sur ce terrain.
Un débat pour rien ?
mercredi 2 mai 2012
[1] Cité in Alain Garrigou, Histoire sociale du suffrage universel en France, Paris, Points, 2002, p. 337.
[2] « if men define situations as real, they are real in their consequences » in Thomas, W.I., and Dorothy Swaine Thomas, The Child in America : Behavior Problems and Programs, Knopf., 1928 , p. 572. Voir également Robert K. Merton, « The Thomas Theorem and The Matthew Effect », Social Forces, 74 (2), décembre 1995, p. 379-424.