La victoire de Marine Le Pen est d’autant plus plausible que les sondages d’intentions de vote oublieraient de prendre en compte l’abstention dixit Serge Galam. Un chercheur du Cevipof que France Info avait déniché et déjà interrogé avant le premier tour. Plus précisément un physicien, discrédité à cause notamment de ses positions climato-sceptiques, membre d’un laboratoire spécialisé en sociologie électorale... cherchez l’erreur.
Il faut croire que le niveau d’exigence de la chaîne, qui rappelle que Serge Galam avait prédit la victoire de Donald Trump, se satisfait de prophéties relevant de la cartomancie ou de la cafédomancie ("lire" dans le marc de café). Quant à la suite de la "démonstration" elle laisse songeur :
avec des si....Des propos que l’on pourrait presque prendre au sérieux, sans pour autant relever le niveau, si on les compare avec ceux des sondeurs toujours disponibles pour spéculer.
Comment gagner ?
L’écart entre les scores sondagiers des deux prétendants du second tour est important, et la candidate du FN "n’a pas beaucoup d’atouts dans cette campagne" prévient le sondeur Emmanuel Rivière (Kantar). Mais...
"Emmanuel Macron a plein de manières de mettre son avantage en péril. La première est peut-être de donner le sentiment que la victoire est trop facile, et qu’il peut enjamber le second tour" (Emmanuel Rivière, Kantar).
"Les débats sont les deuxièmes vecteurs d’information des électeurs" (Frédéric Dabi, Ifop).
Et France Info de conclure
Autrement dit Marine Le Pen peut gagner si elle fait une "bonne campagne", et Emmanuel Macron perdre s’il en fait une mauvaise. La définition d’une "bonne campagne" coule quasiment de source : celle qui fait gagner. Le degré zéro du commentaire politique.
"Emmanuel Macron devra néanmoins se méfier de son adversaire. Malgré deux prestations peu réussies lors des précédents débats, la candidate du Front national sait se montrer plus efficace lors de ces rendez-vous télévisés" (Stéphane Zumsteeg, Ipsos).
Traduction : si les sondages en restent là les prestations des candidats lors des débats télévisés ne changeront rien : la victoire d’Emmanuel est acquise.Sauf si les sondages n’en restent pas là, que Marine Le Pen est au "coude à coude" avec Emmanuel Macron... et là tout est possible. De l’usage du truisme dans l’art de ne rien dire. Au moins les sondeurs confirment-ils ce que l’on sait depuis longtemps : les sondages sont des prédictions.
Quitte à se perdre en conjecture pourquoi se priver de la pire politique fiction, et France Info d’évoquer au final "l’affaire Papy Voise", un vieillard roué de coups par des jeunes trois jours avant la présidentielle de 2002. A vrai dire une "intox" lancée par Tf1, et reprise en boucle par tous les médias. Un pousse au crime.
En 2002, l’affaire "Papy Voise", un vieil homme agressé dans sa maison, trois jours avant le premier tour de la présidentielle, a souvent été mise en avant pour expliquer l’accession au second tour de Jean-Marie Le Pen. "De tels événements peuvent amplifier des tendances existantes, mais ils n’ont pas bouleversé les rapports de force politiques pour autant", assure Frédéric Micheau, directeur du département opinion et politique d’OpinionWay".
Après la fusillade survenue le 20 avril sur les Champs-Elysées, une nouvelle attaque terroriste pourrait-elle jouer sur le scrutin ? Frédéric Micheau assurait le 21 avril à franceinfo qu’il ne fallait pas "exagérer la portée" de l’attentat. S’il "est assez clair que cet événement [a pu bénéficier] à Marine Le Pen [en remettant] en lumière le discours du parti", le sondeur rappelle que "la lutte contre le terrorisme et la sécurité n’arrivent qu’en sixième position [des enjeux auxquels sont sensibles les Français], loin derrière la question du chômage et du pouvoir d’achat."
Un effet à la marge, donc. C’est aussi l’avis de Stéphane Zumsteeg, pour qui une attaque terroriste jouerait un rôle sur "la mobilisation, qui serait plus élevée que prévu", davantage que sur un "mouvement de l’électorat dans les derniers jours" de la campagne.
S’agit-il de suggérer à Daesh un attentat terroriste ? Au passage, Philippe Moreau Desfarges, ancien diplomate et chercheur à l’Ifri, est l’objet depuis le 24 avril (AFP) d’une plainte de la part du président turc Erdogan pour avoir évoqué à l’antenne de BFM Business son assassinat comme hypothèse éventuelle, suite au référendum au résultat contesté par ses opposants politiques : « Soit il y a une guerre civile, soit il y a une autre hypothèse qui est difficile à évoquer, c’est son assassinat », (22 avril 2017) [2].
Evoquer ou suggérer quel dieu verrait la différence ?