observatoire des sondages

Retour sur les marges d’incertitude des sondages d’intention de vote de 2012

jeudi 3 janvier 2013, par Léo Gerville-Réache

Comme d’habitude les sondages de premier tour de la présidentielle de 2012 ont suscité des polémiques. Pour les entreprises de sondages comme pour beaucoup d’analystes politiques, les sondages ont été plus que corrects. En particulier, l’ordre des trois premiers a été respecté. Si la qualité des sondages se résume à cette analyse, on peut se demander pourquoi les "instituts" donnent des sondages au demi-point pour l’ensemble des candidats. Il est sans doute bien plus amusant de voir évoluer des intentions de vote au jour le jour, de plus ou moins 1 ou 2 points, alors même que la précision de la mesure, selon les sondeurs va jusqu’à « plus ou moins 3 points ».

A l’opposé, pour certains candidats les sondages se sont une fois de plus lourdement trompés… On peut toujours considérer qu’il s’agit d’une posture politique qui vise à se sortir d’une mauvaise passe. Cet argument est d’autant plus facile qu’il est validé par l’auto-analyse de la qualité des sondages par les sondeurs eux-mêmes.

Quand deux subjectivités aux intérêts divergents débattent par médias interposés, ils convainquent essentiellement leurs partisans respectifs…

Voici un élément de réflexion qui devrait permettre à chacun de se forger un avis objectif sur une réalité alternative de la qualité des sondages d’intention de vote de 2012. Contrairement à ce que l’on peut trouver (à droite ou à gauche) sur le net, prendre le dernier sondage d’un "institut" et calculer la moyenne des écarts absolus et comparer ce chiffre à la marge d’incertitude théorique de grosso modo 3 points n’a aucun sens. En effet, tous les acteurs savent qu’un écart de 3 points (entre le dernier sondage et le vote) pour un candidat à 10% n’est pas statistiquement équivalent à un écart de 3 points pour un candidat à 25%.

Quand on se penche sérieusement sur la question, on découvre qu’il existe un calcul relativement simple qui permet, à partir des écarts observés sur chaque candidat, de mesurer raisonnablement la marge d’incertitude en 2012 de chaque sondeur (cf. Sondages d’intention de vote : l’estimation des « marges d’erreur »).

Pour le premier tour et pour un candidat dont l’intention de vote est de 25% : l’analyse du dernier sondage de chaque "institut" montre des marges d’incertitude entre 3,2 et 4,7 points alors que les sondeurs annonçaient des marges « théoriques » entre 1,8 et 2,7 points.

Conclusion : les sondeurs se sont au moins trompés sur les marges d’incertitude…

Léo Gerville-Réache
Université de Bordeaux 2, CNRS, UMR 5251

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