Le dernier baromètre mensuel Opinionway-Fiducial, Le Figaro, LCI (1er septembre 2011) annonce un accroissement de l’avance de François Hollande sur Martine Aubry dans les primaires socialistes. Trois jours après l’université d’été du PS et 37 jours avant le premier tour de scrutin (de la primaire faut-il comprendre) ajoute l’AFP. Le feuilleton continue, toujours d’aussi mauvaise qualité.
Le premier devance la seconde de 14 points, reprennent les commentateurs, en progressant aussi bien chez les sympathisants de gauche (44%) que chez les sympathisants PS (48%). Que cachent ces pourcentages non accompagnés des chiffres bruts ? Il faut se reporter à la fiche détaillée pour savoir que sur ces 3202 sondés, 1311 se sont déclarés « sympathisants de gauche » et 819 « sympathisants du PS ». Mais seulement 222 sondés se sont déclarés certains d’aller voter aux primaires. Sans doute trop peu pour en indiquer les chiffres, à moins que, dans ces électeurs potentiels, les résultats ne soient pas conformes puisque François Hollande n’y progresse pas mais recule, comme Martine Aubry, dans des proportions négligeables, et que Ségolène Royal progresse. Sans doute est-il sensé de n’en pas parler mais il aurait été tout aussi sensé de ne pas tirer de conclusions à partir de sous échantillons composés surtout de sympathisants ne prévoyant pas de voter.
Selon les sondages qui s’accumulent sur les primaires socialistes, les chiffres émanent de sympathisants de la gauche, ou de sympathisants du seul PS ou encore des sondés se déclarant sûrs d’aller voter. Ce sont bien ces derniers qui devraient constituer la population la plus pertinente pour des questions sur les intentions de vote. On sait cependant que ces électeurs potentiels sont très incertains. Dans certains sondages, ils sont si nombreux à annoncer qu’ils voteront – réflexe légitimiste du devoir électoral à l’œuvre dans les sondages par téléphone – qu’il y aurait autour de 5 millions d’électeurs participant à la primaire. Personne ne le croit sérieusement. Dans un sondage en ligne comme le baromètre OpinionWay, ils ne sont pas autant surévalués du fait des conditions de passation des questionnaires à des internautes volontaires et sans interlocuteur humain. Dans tous les cas, les sous échantillons sont insuffisants. Une option est de négliger, une autre est de se reporter aux effectifs plus larges de sympathisants même si la grande majorité ne se déclare pas certaine de voter et ne le fera donc pas le plus souvent. On infère alors les scores des candidats de populations de sondés qui, pour la plupart, ne seront pas électeurs.
Dans ces conditions, le commentaire est alors forcément absurde et faux. Va-t-on gâcher de si beaux chiffres par le silence ? Les sondeurs transformés en « politologues » par des journalistes naïfs ajoutent la supercherie de leurs explications à l’insignifiance des chiffres. Selon Stéphane Rozès, François Hollande est « plus dans l’incarnation de la fonction présidentielle ». Où a-t-il trouvé cela ? Pour Brice Teinturier, l’écart s’explique par un « différentiel de présidentialité ». Les sondeurs devraient lire Gaston Bachelard pour apprendre que la présidentialité est aux résultats électoraux ou sondagiers ce que la vertu dormitive est à l’explication des effets de l’opium. Bien sûr, rituellement, ils prennent tous des précautions car il est encore « trop tôt ». Leur manière de dire qu’il ne faut pas faire confiance à ce qu’ils disent. On sait qu’il est inutile d’espérer la fin des caquetages.