Ce que nous appelons le biais légitimiste qui consiste à se déclarer publiquement du côté des valeurs reconnues et des candidats « convenables ». Du coup, forts de leur expérience malheureuse - ils ont sous-évalué longtemps Jean-Marie Le Pen - les sondeurs français imputent au sondeurs américains leur ancienne erreur - qu’eux-mêmes ne feront plus ! Ils en tireraient même un avantage au profit des sondages en ligne qu’ils feraient en France alors qu’aux Etats-Unis, les sondeurs recourraient encore surtout aux sondages par téléphone où le biais légitimiste (la honte) opèrerait plus que par internet. Sur les deux points, il faudrait le démontrer, quoique cela aille en totale contradiction avec une autre affirmation des sondeurs français selon laquelle les sondages en ligne donnent les mêmes résultats que les sondages par téléphone. Sur tous ces points, l’analyse permettra de mieux répondre car la science n’est pas pressée contrairement aux affaires où il ne faut pas manquer de culot et ne pas reculer devant les arguments les moins fondés.
Il est cependant une différence politique déjà évidente entre les deux termes du parallèle. La différence la plus importante. Si les sondeurs français s’étaient trompés, ils avaient surtout trompé le candidat Lionel Jospin qui, quasi sûr de sa victoire, avait renoncé à éviter et rallier des concurrents au sein de son propre camp (Christiane Taubira et Jean-Pierre Chevènement surtout). S’il n’avait pas été induit en erreur par les sondages, il se serait retrouvé au second tour où il était donné favori. Bref pas de 21 avril ! Rien de tel aux Etats-Unis où, sous bénéfice d’analyse plus approfondie, la configuration de la lutte à deux joueurs n’a pas entrainé d’effet performatif des sondages. Il est probable que s’ils avaient donné le vainqueur, Donald Trump l’aurait été.