Il fallait l’AFP pour apprendre que la présidentielle de 2012 restait incertaine… Les sondeurs avaient un peu oublié la candidate du FN pendant la primaire socialiste. Elle revient : « Marie Le Pen stagne à un haut niveau, « un 21 avril toujours pas exclu » titre une dépêche AFP (31 octobre 2011). En réalité, lisons-nous immédiatement, elle subit un « reflux » dans les mesures de l’Ifop, de CSA et de Ipsos. Ainsi, dans le sondage Ifop (JDD, 21 octobre 2011), elle est distancée de 8 points par Nicolas Sarkozy contre 3 auparavant. Mais bizarrement, c’est une occasion d’invoquer la marge d’erreur de 2,5 % qui « oblige à la prudence ». Habitués à ce que les commentateurs n’y fassent pas allusion quand des scores n’ont qu’un point de différence, on est surpris par le scrupule. D’autant plus que 8 points, c’est largement plus que ce que peut comprendre la marge d’erreur de 2,5 %, soit au maximum 5 %.
Un sondeur fait toutefois exception puisque pour BVA, Marine Le Pen remonte à 19% dans les intentions de vote contre 16 % en juillet et l’écart avec Nicolas Sarkozy n’est plus que de 4 points. Quoiqu’il en soit, « aucun analyste ne se risque à exclure totalement l’hypothèse d’un 21 avril ». Effectivement quels que soient leurs résultats, aucun sondeur ne se risque six mois avant une élection à prédire quoi que ce soit. Sinon l’incertitude… Le suspens est donc préservé, « son avenir demeure totalement ouvert ». Au moins les cartomanciennes prennent-elles quelques risques avec leurs clients. Quant aux haruspices qui lisaient l’avenir dans les entrailles des poulets, les Romains disaient que deux haruspices ne pouvaient se rencontrer sans éclater de rire. Le problème des sondeurs contemporains est sans doute qu’ils se prennent au sérieux si l’on en juge par leurs mines tristes qui encombrent les écrans de télévision. Il est vrai que les sondages ne sont pas prédictifs. Quand cela les arrange toutefois… ou que l’un d’eux est particulièrement audacieux : « Marine Le Pen aura un score qui oscillera entre […] 14-15% et plus de 20% ». Avec une telle fourchette, il a des chances de ne pas se tromper.
N’est-ce pas assez de prudence ? Il faut encore invoquer la « volatilité potentielle des intentions de vote » alors que 47 % des sondés du sondage Ipsos disent pouvoir changer de choix. Ne serait-il pas plus judicieux de dire que des sondages qui donnent des résultats contraires et si loin de l’échéance ne sont pas fiables ? Cela n’aurait pas donné une information. Sans valeur certes, mais une information. Pour entretenir un intenable suspens.