ON SAVAIT
- que les sondeurs ne goûteraient pas les propositions des sénateurs Hugues Portelli et Jean-Pierre Sueur, adoptées par la commission des lois du Sénat et visant à réformer la législation des sondages. La table ronde les réunissant autour des deux sénateurs, organisée par courtoisie, l’a amplement confirmé. Bien sûr, les sondeurs préféraient le statu quo, ne rien changer, qui a pourtant complètement ruiné leur crédit auprès des scientifiques.
ON SAVAIT
- que deux propositions allaient spécialement déclencher leur ire. La publication des chiffres bruts avant le redressement des sondages sur les intentions de vote et l’interdiction de toute forme de gratification concernant les sondages en ligne.
Sur la première mesure, les arguments des sondeurs sont bien connus. Il s’agit d’un secret de fabrication, qui réduit les sondages à une basse opération commerciale, et manifestement pas de science où toute démonstration doit être publiée. Par contre il est intéressant de voir apparaître en public un argument qui était réservé aux initiés et selon lequel les citoyens seraient trop stupides pour comprendre les redressements : « Cela va créer un trouble majeur, les gens ne sont pas des statisticiens » [1]. Seuls les sondeurs doivent être assez intelligents.
Sur la deuxième mesure les sondeurs avouent enfin ce qu’ils ont toujours nié : les sondés ne répondent pas de façon aussi citoyenne qu’ils le disaient jusqu’alors. Les sondeurs font comme s’il s’agissait de sauver les sondages alors que les sénateurs pensent avant tout à la sincérité de l’expression démocratique. Sachant que les sondages participent à la sélection des candidats, ce que plus personne ne nie, les gratifications réintroduisent une forme d’achats des votes, comme au XIXe siècle.
ON SAVAIT
- que les sondeurs avaient des amitiés dans les milieux médiatiques. La réaction n’a pas tardé sous la forme d’articles qui font la part belle à leurs arguments pourtant maintes fois ressassés [2].
ON SAVAIT
- que les sondeurs étaient très liés à certains politologues de Sciences-Po. La situation semble dangereuse pour eux à en croire le renfort du politologue proche de l’UMP et directeur du Cevipof, Pascal Perrineau. Non content de reprendre les vieilles antiennes des sondeurs à son compte, celui-ci s’est même révélé si énervé qu’il a trouvé les sénateurs idiots. L’idiotie serait en l’occurrence : « C’est idiot. Nous leur [les sondés] demandons un vrai travail, c’est normal qu’il y ait une rémunération, même légère, mais une rémunération, qui est un instrument de fidélisation » [3].
Résumons nous : si les sondages sont bien à l’image de la population française, selon la logique des échantillons représentatifs, les sondés seraient à l’image des électeurs, trop stupides pour comprendre et pas assez désintéressés pour voter sans être payés. C’est le portrait du citoyen français selon les sondeurs.