On serait curieux de connaître les justifications du sondeur. On n’en voit pas parmi les excuses habituelles. Un déplacement ultime ? On connaît l’argument des sondeurs désignant les électeurs en quelque sorte coupables d’avoir basculé à la dernière seconde. La volatilité, disent-ils, assurant même que cela se passerait dans le secret de l’isoloir. Après plusieurs mois de sensibilisation à la question, ces électeurs seraient-ils si futiles et en si grand nombre ? Difficile aussi de croire que les sondages auraient enregistré une tendance puisque aucun sondage n’avait enregistré une telle victoire du « non » et que, si tendance il y avait, elle était inverse.
Il reste donc à expliquer l’erreur par le travail des sondeurs et donc par leurs corrections. Faute de les connaître précisément, on est donc livré aux conjectures appuyées sur ce que nous savons de ces opérations dans d’autres cas. Des corrections fondées sur de calculs de sous déclaration et de sur déclaration d’une part et des corrections fondées sur l’intuition d’autre part, telles sont les recettes habituellement engagées. On voit mal comment la correction des sous-déclarations pourrait intervenir aussi massivement sur les intentions de vote d’un référendum puisque ces corrections sont définies par la déclaration des votes antérieurs. Pour exagérer à ce point le « oui », il a fallu estimer que beaucoup de sondés étaient enclins à cacher ce choix. Rien dans la consultation ne permet de le dire et il n’est donc de base qu’arbitraire au chiffrage de la correction. Il faut donc en venir à cette correction intuitive – le doigt mouillé - des sondeurs qui prétendent sentir le sens du vent. Ils ont été bien pitres en cette occasion. Mais qu’est-ce que cette intuition ? L’ordinaire wishful thinking les a amenés si souvent à se tromper dans leur histoire. Mais aussi la tentation irrépressible de se faire faiseur d’opinion. En somme, un zeste d’autopersuasion et un zeste de manipulation cela fait près de 20% "d’approximation".