Les sondages se succèdent qui affichent des très mauvais scores de popularité pour le président de la République et le Premier ministre [1]. Un trait semble-t-il devenu structurel de l’opinion depuis que Nicolas Sarkozy pendant près de cinq ans a navigué sur des niveaux de popularité très bas. Et les commentateurs de comparer le successeur à son prédécesseur en une sorte de jeu du plus mal aimé [2]. Cela n’a pas empêché le mal aimé Nicolas Sarkozy d’aller jusqu’au bout de son mandat et de faire un score électoral sans rapport avec sa cote de popularité [3]. Pourquoi l’impopularité affecterait-elle différemment le mandat de François Hollande ? Car la popularité, personne ne l’a jamais rencontrée sinon dans certains bains de foule qui échappent aux services de sécurité. Celle des sondages n’est qu’un mot.
Entre les élections et comme une élection permanente, les cotes de popularité sont diffusées mais, contrairement aux élections, ne changent rien au cours institutionnel des choses. Car dans la Constitution, la popularité n’intervient dans aucun mécanisme de gouvernement. Elle n’est d’ailleurs pas citée. A quoi donc sert la popularité ? A supposer qu’elle soit élevée, que changerait-elle de l’exercice du pouvoir sinon la satisfaction des dirigeants de se sentir aimés et puisque l’inverse est la règle, le fatalisme de ne pas l’être puisque cela est devenu un attribut du métier politique. Pourquoi donc faire autant de place à ce fantôme ? L’impopularité permet à des journalistes de parler et d’écrire qui, hors compétition électorale, ont ainsi trouvé moyen de commenter la politique comme une course de chevaux. On voit le suspens : le record d’impopularité sera-t-il battu ? Y aura-t-il un rebond ? Jusqu’aux questions qui ne se posent pas comme peut-il continuer en étant aussi impopulaire ? Si les dirigeants se mettaient à y croire, on pourrait imaginer qu’ils se laissent intimider, souffrent de ne pas être aimés, envisagent même de se retirer, en somme écoutent les alarmes de leurs juges médiatiques si sages, si lucides et si prodigues de leçons qu’on peut se demander pourquoi ils ne deviennent pas les gouvernants. Et on voit bien à quoi sert l’impopularité. Pour des commentateurs qui n’ont aucune légitimité particulière - ils ne sont pas élus, ils ne sont pas savants – l’opinion publique leur donne le droit de parler. L’impopularité, c’est leur droit à donner des leçons. Comme une bonne raison d’accepter de répondre aux sondages est de dire son mécontentement – on imagine mal des gens dire qu’ils sont heureux, que tout va bien, qu’ils font confiance, etc. - en un mot et pas plus, les commentateurs sont servis. Tant qu’il existe encore une presse.