Si on emprunte au langage médiatique, l’Observatoire des sondages entame sa rentrée 2010 sans qu’on puisse dire qu’il y ait eu une véritable trêve sur ce front. Certes, les animateurs ont a été un peu moins actifs. Ils devraient s’en excuser si leur activité de veille et de critique n’était complètement bénévole. De grâce, ont-ils envie parfois de protester, laissez-nous souffler. Cet été, ils l’ont souvent pensé alors qu’ils souhaitaient surtout à reconstituer leur force de travail. L’actualité les sollicita à peine moins que l’an dernier où l’OpinionGate éclatait en plein mois de juillet. Cette fois-ci, puisque cela devient une sorte d’habitude, le scandale de l’été, mettait moins l’attention sur les sondages. En tout cas directement. Car, la mauvaise situation dans laquelle se retrouvaient les gouvernants, avec l’affaire Bettencourt, n’était pas étrangère à l’offensive politique lancée sur des sujets dérivatifs. La retraite dans laquelle le principal protagoniste, le ministre du travail, était compromis de manière si éclatante qu’encore une fois, il faut bien se demander comment la responsabilité politique a pu devenir un principe aussi obsolète en France. Et surtout, il y eut l’offensive présidentielle sur la sécurité. Sur ces deux terrains, les sondages ont montré une fois de plus qu’ils appartiennent dorénavant à la panoplie ordinaire de fabrication de l’opinion mais selon des procédés qui attestent que les fabricants ont de moins en moins de scrupules. Il fut un temps où aucun sondeur n’aurait imaginé administrer et publier des sondages aussi manipulatoires et faut-il le dire aussi malhonnêtes. Il faut en tirer les conclusions ultimes pour notre nouvelle saison (pour parler cette fois comme dans les séries télévisées).
Comme l’Observatoire des sondages avait suivi l’OpinionGate en 2009 et 2010, les push polls vont être le fil conducteur pour la prochaine année. Une série d’articles va donc suivre pour expliquer leur généralisation en France. Et bien sûr, l’actualité des push polls sera une partie importante de notre veille puisque nous ne prenons aucun risque en annonçant d’ores et déjà que l’année à venir va en être particulièrement riche.
Avec l’Opiniongate qui nous avait beaucoup occupé l’an dernier et valu quelques ennuis judiciaires (toujours en cours), notre critique des sondages a manifestement pris un accent politique qui pourrait prêter à confusion. Il est clair que l’usage manipulatoire des sondages caractérise aujourd’hui un pouvoir politique aux tendances très antidémocratiques. Du coup, notre objectif peut en paraître flou. Sans être indulgent à l’égard de la crédulité politique d’autres partis, il est clair qu’ils ne sont pas au centre de la critique car ils ne détiennent pas le pouvoir, et n’ont pas les moyens financiers de l’Etat et des entreprises qui paient les instruments de manipulation. Surtout, ils ne sont pas menacés de perdre le pouvoir comme le pouvoir sarkoziste semble en découvrir le danger avec quelque affolement. Dans une situation qui peut tourner à la panique, l’entreprise politique dont les caractères d’autocratie élective sont particulièrement prononcés, va forcément utiliser jusqu’à la démesure les instruments de fabrication de l’opinion. Le pouvoir va être servi par la dégradation profonde des pratiques et du métier de sondeur. Cela nous donne des devoirs particuliers de vigilance et nous vaudra probablement quelques ennuis supplémentaires. L’Observatoire des sondages essaiera d’être à la hauteur sans négliger les autres aspects de l’actualité et de l’analyse des sondages.