Ce tribunal de l’opinion n’est pas explicitement désigné mais il est tellement évident qu’il s’agit des sondages à en juger par les chiffres émaillant les commentaires. On y observe les fluctuations des avis positifs et négatifs. Bien commode. Précis, au moins, et bien plus simple que de s’en remettre aux procédures constitutionnelles. Ainsi, la réussite ou l’échec d’une politique ou d’un mouvement social se mesurerait dorénavant par les pourcentages. Évident. Quelques milliers d’internautes rétribués arbitreraient le conflit. Mieux assurément que les confrontations violentes. Et l’on n’a même pas à douter de la réalité de cet arbitrage. Car si tout le monde croit que le conflit sera arbitré par les sondages, il le sera effectivement. Un parfait exemple du théorème de Thomas :
« if men define situations as real, they are real in their consequences » [1].
Au moment où la question des fake news est sur la sellette, où certains se proposent de légiférer, quand d’autres proposent d’éduquer les écoliers, il serait sans doute utile d’inclure une éducation à ces informations, qui ne sont ni des informations exactes ni des informations fausses mais des prophéties créatrices. Et en premier lieu une éducation à ceux qui les diffusent.