Qu’on ne s’y méprenne pas, ce n’est pas à la suite des fiascos des sondages dont sont seuls évoqués le Brexit et l’élection de Donald Trump, ce n’est pas non plus à la suite de la décision du Parisien de renoncer aux sondages électoraux ni de la peur de se tromper encore une fois. Non, la campagne est trop courte, assure le sondeur maison Brice Teinturier (Ipsos) dans une élémentaire manœuvre tactique justifiant qu’il ait fait des sondages sur la primaire de la droite mais qu’il n’en fera pas sur celle du PS. Ainsi sera sauvé l’essentiel, faire des sondages sur l’élection présidentielle. C’est donc un recul provisoire mais un recul quand même.
Ainsi doit s’expliquer l’agressivité des défenseurs des sondages contre le « sondage bashing » puisqu’il semble bien que les sondeurs et les journalistes concernés ignorent la critique des sondages depuis Herbert Blumer et Pierre Bourdieu jusqu’aux universitaires critiques d’aujourd’hui de loin les plus nombreux. On sourira même à leur prétention à dire la science aux scientifiques. Cette obstination est un bel exemple de l’inhibition méthodologique que relevait un autre critique – C. Wright Mills, encore un scientifique dans l’erreur - et qu’illustrait un autre scientifique aussi dans l’erreur – Valdemar O Key - quand il évoquait l’ivrogne cherchant ses clefs à la lueur d’un réverbère non parce qu’il les avait perdues à cet endroit mais parce que là il y avait de la lumière. Le réverbère scintille donc dans deux pages du journal avec l’enquête Ipsos-Le Monde-Cevipof. On comprend que les critiques rendent fous ceux dont ils cassent le jouet.