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Doxosophes polyvalents

mercredi 21 mars 2012

On sourirait si le sujet n’était dramatique. L’actualité réserve parfois des surprises désagréables aux journalistes quand elle bouscule les plans préparés. En ce lundi 19 mars 2012, cela était le cas pour l’émission C dans l’air sur France 5. La manifestation de Jean-Luc Mélenchon tenue la veille sur la place de la Bastille devait en être le thème. Et puis le massacre de Toulouse avait bousculé le programme. Enfin pas tout à fait car, si le thème était modifié, les invités du plateau restaient les mêmes. Astuce des concepteurs de l’émission qui, au lieu de discuter d’un candidat en campagne allaient le faire d’un événement en campagne. Quant aux invités, des habitués à vrai dire, ils étaient suffisamment polyvalents pour discuter de n’importe quel sujet, qualité d’autant plus nécessaire qu’on ne savait encore rien sur l’auteur et les mobiles des crimes. A vrai dire, rien de plus facile que de dire l’opinion en toutes circonstances : la rhétorique des doxosophes permet de parler de tout puisqu’elle fait parler le peuple :

- Yves Calvi (France5) : « donc là vous nous dites que la vraie violence la violence de sang, celle qui tue qui fait qu’aujourd’hui la France est meurtrie, elle oblige ou elle astreint les candidats à une relative pondération dans les 30 jours qui nous séparent maintenant du premier tour ».

- Dominique Reynié (Fondapol, Sciences-Po) : « je le crois. Je crois que les Français vont exiger cela, qu’ils seront très sévères avec les responsables politiques, aussitôt passée la semaine qui va suivre ce drame atroce, qui reprendraient le registre antérieur de confrontation presque violent je pense que ça leur serait reproché. On va leur demander en revanche une discussion plus fondamentale plus substantielle qui n’a pas encore eu lieu et sans doute formellement plus modérée ».

On n’a pas oublié le sujet manqué et comme pour suggérer ce que les téléspectateurs ont aussi manqué, un lien immédiat entre l’événement dont il devait être question et celui dont il est question, un rapprochement audacieux est osé :

- Yves Calvi  : « Je prends le dernier gros événement politique de campagne qui est l’incontestable réussite du meeting de Jean Luc Mélenchon hier. Est-ce que vous diriez : la prise de la Bastille par Jean Luc Mélenchon par définition c’est pondéré dans les jours et les semaines à venir ? ».

- Dominique Reynié : « Ah ! oui, oui ! Tout est pondéré maintenant. Je crois, je le dis c’est à chaud… mais… il y a un drame terrible qui a eu lieu ça ne fait pas de doute. Il y a un espèce de choc entre la proximité d’un premier tour qui a son importance et ce drame épouvantable, et on va essayer de comprendre les raisons on va mettre du temps, ça va peut-être être très long, mais il faudra comprendre les raisons pour lesquelles ce drame a eu lieu. Ça ne se produit jamais sans raison ni par hasard ce type de drame ».

Faut-il comprendre que la Bastille encourage la violence à moins que ce ne soit les discours de Jean-Luc Mélenchon ? Ce n’était peut-être pas la meilleure manière de plaider l’unanimité.

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