Si le sondeur n’a pas daigné envoyer la notice du sondage à la commission, en contravention avec la loi de 1977 (ni la commission la réclamer), elle figure toutefois sur son site internet. Sa lecture confirme nos premiers soupçons (cf. Les sondages contre la démocratie).
Comme pour ses confrères plus coutumiers de ce type de production, nous ne prendrons pas le sondeur pour un simple d’esprit méthodologique, autrement dit impossible de croire qu’il ne savait pas ce qu’il faisait, la dimension délibérément manipulatrice repose à la fois sur la date de publication et le type de sondage choisi :
juste après le scrutin où les allégations de « Président le plus mal élu » fleurissaient dans le camp des adversaires d’E. Macron, surtout les plus farouches, et sur les « réseaux sociaux » mais aussi dans la presse, une partie ne faisant au mieux que les tempérer.
un « simple » sondage d’opinion par internet et non un sondage d’intention de vote. Si, « cela va de soi », la légitimité d’un élu ne saurait procéder d’un QCM d’intention de vote, malgré les désirs semi-conscients des sondeurs, elle ne saurait, encore moins pourrait on dire, procéder d’un QCM d’opinion.
Cela dit :
A la différence des intentions de vote les opinions enregistrées dans les « simples » sondages d’opinion ne sont jamais corrigées, redressées, à la hausse ou la baisse. Est-il nécessaire d’ajouter que leurs résultats ne sont empiriquement jamais vérifiés car invérifiables. La nature même des sondés diffère. Plus précisément les échantillons d’intention de vote sont composés de sondés « certains d’aller voter », qu’ils déclarent explicitement ou non une intention, qu’ils mentent ou non sur leurs intentions, voire même sur leurs caractéristiques de potentiels votants. Exercice toujours délicat et toujours aussi opaque - les sondeurs refusant de communiquer leurs algorithmes et autres formules de correction - le redressement des chiffres bruts tente bon an mal an de faire la part des choses. Rien de tout cela dans un simple sondage d’opinion où s’expriment indistinctement, électeur, non électeur, votant, non votant, abstentionnistes, etc. Leurs « opinions », leurs mauvaises humeurs, leurs lubies, a fortiori leur sincérité, ne sont l’objet d’aucune mesure de correction (de « modération » ?). A l’impossible nul n’est tenu.
Nous rappellerons enfin certes succinctement l’absence cruelle et « coupable » de représentativité de l’échantillon de ce type sondage en ligne vite fait mal fait : corpus de répondants constitué spontanément où les plus politisés, pour ne pas dire les plus excités sont surreprésentés [1].
A notre connaissance aucun responsable de cette petite entreprise de sondages et de conseils, d’une vingtaine de salariés, fondée et présidée par un ancien journaliste, ex-président du sondeur CSA, passé par Euro-RSCG, plutôt connu dans la presse pour ses affinités avec l’ex-UMP (devenu LR en 2015) [2], n’est membre ou militant actif de LFI ou de RN. S’agissait-il donc de faire du bruit, qu’importe ses effets, mis à part celui de les faire vivre aussi ? La réponse est dans la question.