observatoire des sondages

Faux et usages de faux : les hypothèses de second tour

mercredi 14 avril 2021

Le scrutin présidentiel n’aura lieu que dans un an, période encore longue quoiqu’on dise, surtout en politique, avant que l’on puisse aboutir à une « offre électorale », réelle, sur laquelle auront à se prononcer les électeurs. Ce qui n’empêchera pas d’ici là sondeurs et médias, c’est devenu maintenant une (mauvaise) habitude, de se perdre en conjectures, d’inventer des candidats, d’imaginer des confrontations, des gagnants, des perdants, autrement dit des faux tant les hypothèses proposées aux sondés manquent souvent de fondement par rapport à la réalité (parfois au mépris de leurs propres mesures). L’analyse et la compréhension du champ politique étant le cadet de leur préoccupation.

Si tous les scrutins donnent lieu à ces « petits jeux » l’élection présidentielle demeure le « terrain d’expérimentation » privilégié des fantaisies sondagières. Celle de 2022 ne fera pas exception puisque les premières hypothèses impossibles ont été échafaudées par l’Ifop et publiées par le magazine Marianne le 17 mars 2021.

Les résultats n’ont pas manqué de troubler l’ensemble des formations politiques et notamment celles de gauche. C’était sans doute l’objectif poursuivi. Aucune n’a, à notre connaissance, soulevé ou identifié le problème, pourtant de taille. Marine Le Pen gagnerait au deuxième tour face à Anne Hidalgo. Elle serait en revanche battue si elle était confrontée à Xavier Bertrand. Des scénarios impossibles puisque ni Xavier Bertrand ni Anne Hidalgo ne passeraient le premier tour. Les auteurs du sondage ont-il oublié que la présidentielle française comporte deux tours de scrutin ? Bien sûr que non. Ils ont délibérément ignoré les résultats du premier. Ils ont donc produit et diffusé des faux (cf. ci-dessous).

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La commission des sondages n’a pas pour l’instant pas réagi. Si son indolence complice face aux sondeurs et à la presse est proverbiale on n’en demeure pas moins surpris par ce silence sur un aspect autrement plus crucial de l’information électorale et la sincérité des votes, que la publication des marges d’erreur [1], une pratique qui contrevient frontalement à sa « jurisprudence ». A -t-elle oublié qu’en 2008 elle invitait explicitement les sondeurs à proscrire les hypothèses de second tour en contradiction avec les résultats des premiers tours, pratique qualifiée de manipulation de l’opinion cf. ci-dessous Rapport 2008-2009 : La commission des sondages face aux élections municipales et européennes de 2008 et 2009, p. 4-5.

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Venant d’une institution conciliante depuis aussi longtemps l’évocation d’une « manipulation de l’opinion » rend presque plausible l’hypothèse d’une défaille de la mémoire institutionnelle. Quoiqu’il en soit c’est fâcheux. A suivre.


[1Objet d’un communiqué de la commission le 9 avril 2021. Elle n’était exigée jusqu’à présent que lors de la première publication.

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