23 061 personnes interrogées, on n’a pas « mégoté » sur le chiffre même si on avait cru qu’à l’inverse les sondages avaient gagné leur succès en se satisfaisant de populations réduites pourvu qu’elles soient représentatives. Il est vrai que le nombre permet ici de célébrer les mérites des sondages en ligne. Sachant que l’on propose des gains même légers aux sondés qui se rapprochent de plus en plus d’électeurs, on semble s’acheminer vers une opinion rétribuée comme norme de l’expression publique d’une société où tout devient marchandise. Mais cela n’est-il pas un autre ordre de réflexion ? Philosophique.
On s’interrogera aussi sur un panel qui doit être interrogé 16 fois jusqu’à l’élection présidentielle de 2017. Comment les sondeurs prendront-ils en compte l’effet de panel qui éloigne les sondés à répétition des conduites communes ? On trouvera sans doute un intérêt à ce vaste échantillon pour composer des sous-populations suffisantes. On doutera pourtant d’une problématique reprenant la vieille antienne du Cevipof opposant les sempiternelles variables lourdes et les variables de conjonctures politiques. Ces dernières emportent toujours les préférences du Cevipof dans une alternative dont le bien-fondé n’a toujours pas été démontré. Ni neutre idéologiquement ni fondé scientifiquement. Quant à la « prévision » qui intéresse d’abord les médias, on peut se demander leur utilité à deux jours du scrutin. On attendra volontiers dimanche soir et on verra bien.
Au fait, on peut supposer que pour atteindre une certaine « exactitude » sondagière, les chiffres bruts ont été corrigés. Dans quelle mesure ? On sait que les sondeurs se prévalent du secret industriel pour ne pas livrer les clefs mais en s’associant à un centre de recherche scientifique, il faut bien que cette précision de méthode soit publiée. Le Cevipof ne saurait s’affranchir de cette règle de la production scientifique. On attend donc de savoir quel coefficient de redressement a été appliqué à chaque parti.