Les sondages municipaux se multiplient. Ils posent un certain nombre de questions techniques. La population de référence étant limitée, il est difficile - pour des raisons légales notamment - de procéder par questionnaire en ligne. Les enquêtes sont donc effectuées par téléphone. Les effectifs se situent entre 500 et 600 personnes. Pour ceux qui s’interrogeraient sur des effectifs moins nombreux que les 1000 sondés environ des sondages nationaux, il faut savoir que les seuils de représentativité ne varient pas selon la taille globale de la population. Du moins dans les grands nombres. Autrement dit, si l’on considère qu’il faut un échantillon de 1000 personnes pour une population de 30 millions d’adultes, il en faut autant pour 30 fois moins. Evidemment, cela n’est pas vrai pour de petits effectifs. Or les populations locales se situent entre deux dimensions. Statistiquement ce n’est pas une bonne raison pour diminuer par deux la taille de l’échantillon mais outre les raisons d’économie, cela facilite la tâche pour parvenir à un échantillon présenté comme représentatif. Sachant le nombre élevé d’appels téléphoniques nécessaires pour parvenir à cet « échantillon représentatif », est-il possible de respecter les quotas ? Si l’on prenait un chiffre moyen souvent cité, mais en fait variable, de 10 appels pour un questionnaire valide, une bonne partie de la population locale devrait être appelée. Cela paraît difficile en se reportant au ratio sondés/électeurs inscrits :
Commune | Inscrits [1] | Echantillon | Abstention | Refus d’exprimer une intention de vote | |
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OpinionWay-Corse Matin-France3-France Bleue [2] | Ajaccio | 1er tour :18% 2e tour :19% (pour les 3 hypothèses testées) | |||
CSA-Nice Matin [3] | La Seyne-sur-mer | 1er tour : 25% ou 26% (2 hypothèses testées) pas de 2e tour | |||
CSA-Nice Matin [4] | Brignoles | 1er tour : 20% (pas de 2e tour) | |||
BVA-Le Parisien-France Inter [5] | Toulouse | 1er tour : 12% 2e tour : 9% ou 10% (2 hypothèses) | |||
BVA-Le Parisien [6] | Paris (5e arrt) | 1er tour : 12% 2e tour : 13%, 16%, ou 17% (3 hypothèses) | |||
TNS Sofres-Le Nouvel Observateur-RTL [7] | Perpignan | 1er tour : 11% 2e tour : 11% | |||
Ifop-Centre Presse Aveyron [8] | Rodez | NC | |||
Ifop-Europe1-La voix du Nord [9] | Boulogne-sur-mer | NC | |||
CSA-Nice Matin [10] | Vallauris | 1er tour : 30% (2 hypothèses testées) (pas de 2e tour) | |||
Ifop-Europe 1-La voix du Nord [11] | Hénin-Beaumont | NC | |||
Ifop-Charente libre [12] | Cognac | NC | |||
TNS Sofres-Le Nouvel Observateur-RTL [13] | Angers | 1er tour : 6% 2e tour : 10 % ou 5 % (2 hypothèses) | |||
Ipsos- steria-France 3-Corse viastella-RCFM- Corse-Matin [14] | Bastia | (1er tour) |
1er tour : 14% 2e tour : 14%, 15%, 16% ou 18% (4 hypothèses) | ||
BVA-Orange-Le Dauphiné Libéré-France Bleu Isère [15] | Bourgoin-Jallieu | 1er tour : 12% 2e tour : 11%, 13% ou 13% (3 hypothèses) | |||
CSA-BFM TV-Le Figaro-Orange [16] | Marseille (3e arrt.) | (1er tour) |
1er tour : 13% 2e tour : 16% |
Les sondeurs affirment évidemment respecter les quotas. Ils ont une bonne explication avec les variations du taux de répondants selon les unités démographiques. Cette fois, la sociologie est avec eux car le taux de réponse est plus élevé dans les petites unités démographiques que dans les grandes. Les chiffres qui nous ont été cités sont de 8-9 appels pour les villes moyennes (quelques dizaines de milliers d’habitants moins souvent sollicités) quand il faut 20 appels pour les grandes villes comme Paris, Marseille, etc. Les habitants de certaines régions sont aussi moins accueillants aux enquêteurs que les autres. Toulouse ou la région PACA étant considérées comme « difficiles ». La Corse bat un record d’inaccessibilité avec 30 appels téléphoniques pour recueillir un questionnaire complet. Il est donc difficile dans certains cas de respecter les quotas, c’est-à-dire de trouver des individus de certaines catégories sociales, par exemple dans les catégories populaires jeunes. Cela pousse à s’accorder quelques facilités. Il est difficile de savoir si tous les sondeurs font bien, ou mal, leur travail, la discrétion étant moins une question de confraternité que d’intérêt commun. Si l’on considère les marges d’incertitude, forcément plus élevées pour les strates réduites, si élevées que le public est « averti », il reste que ces sondages locaux ne comportent pas d’effectifs de la partie « utile » c’est-à-dire des sondés ayant émis une intention de vote par rapport à ceux qui ne l’ont pas fait. Selon nos informations, ces non réponses s’élèvent à environ 40 %. Les tableaux des marges d’incertitude devraient se reporter à ces seules intentions exprimées et non à l’effectif total. La proportion de sondés répondant après relance, c’est-à-dire ayant dans un premier temps refusé de répondre (les « NSP fuyants ») n’est pas indiquée non plus. On ne sait pas non plus quels sont les redressements effectués. On est donc loin d’une transparence minimale. S’agissant d’intentions de vote, il faudra bien comparer cependant avec les résultats électoraux.